Qu’est-ce qui pousse cet organisme de régulation à agir ainsi ? Au Brésil, l’Anatel expérimente une approche particulièrement draconienne pour contrer le phénomène IPTV ainsi que les flux illégaux. De quelle manière ? En s’attaquant directement aux serveurs centraux !

© Shutterstock / D-VISIONS
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Les partisans de la neutralité du net pourraient bien être déçus. Si le Brésil choisit cette voie, il disposera d’un outil additionnel avec un système de blocage particulièrement intrusif.

Une liste noire, accompagnée d’une liste blanche

Face à l’expansion de l’IPTV illégal et du piratage des flux protégés de streaming, le Brésil semble collaborer étroitement avec les détenteurs de droits pour élaborer des solutions face à cette problématique.

Alors que le pays a déjà mis en place un mécanisme de blocage ayant permis d’inscrire pas moins de 11 800 domaines sur liste noire, les instances, incluant l’Anatel (l’analogique de l’ARCOM au Brésil), souhaitent garantir que seules les plateformes et les dispositifs approuvés peuvent diffuser du contenu !

Une méthode des plus radicales

Analyse de l’impact technologique et juridique

Au-delà des implications immédiates de cette démarche, il est crucial de considérer les répercussions à long terme que cette approche radicale pourrait avoir sur le paysage numérique au Brésil. En interférant directement avec les serveurs centraux, les régulateurs s’immiscent non seulement dans la gestion technique des flux de streaming, mais également dans les droits fondamentaux des utilisateurs, ouvrant ainsi la voie à des abus potentiels. De plus, le risque de créer des tensions entre les gouvernements et les entreprises technologiques augmentera, car les plateformes de diffusion pourraient envisager de quitter le marché brésilien en raison de cette intrusion.

Conséquences sur la neutralité du net

La neutralité du net, principe fondamental garantissant que tous les contenues sur Internet soient traités de manière égale, est mise à mal alors que le Brésil opte pour un mécanisme de contrôle et de blocage de contenus. Si cette tendance se généralise, elle pourrait transformer le concept d’internet libre en une plateforme de censure, où l’arbitraire des régulateurs pourrait restreindre l’accès à des informations cruciales. Cela pourrait avoir des implications non seulement pour la consommation des médias, mais également pour la liberté d’expression et le débat public dans le pays.

Alors, comment pourrait-on atteindre cet objectif ultimatum ? Dans une récente allocution chez Tele.Síntese, Artur Coimbra, membre sortant du conseil d’administration d’Anatel, a partagé des remarques surprenantes qui révèlent qu’un mécanisme de blocage sur les routeurs centraux est déjà en phase d’expérimentation. Précisant que le Brésil doit se doter d’un procédé de blocage automatique, qui ne requiert pas de décision judiciaire, il ajoute : « la deuxième étape, que nous devons encore analyser, puisque certaines sociétés sont favorables, tandis que d’autres demeurent plus réservées, consiste à permettre à Anatel d’accéder aux routeurs centraux pour émettre un ordre direct sur le routeur ».

Pour l’exprimer plus simplement, le Brésil envisage de suivre le même chemin que l’Italie et son Piracy Shield avec le blocage automatisé. Ce système, déjà controversé, d’abord à cause des erreurs commises, comme lorsque Google Drive a été bloqué il y a quelque temps, et également parce que son efficacité serait bien loin des promesses initiales.

À cette première déclaration, Arthur Coimbra ajoute : « Les entreprises qui jugent cela pratique peuvent nous offrir un accès restreint, pas un accès intégral, afin que nous puissions mettre en œuvre ces blocages directement pour les dispositifs non certifiés et non homologués. Un accès limité pour que nous puissions uniquement effectuer ces blocages à distance ». Pour lui, cet accès « serait une sorte de sceau numérique ».

Cela implique qu’en plus des moyens dont disposent déjà les autorités, l’Anatel désire accéder directement aux routeurs centraux pour interdire les appareils non certifiés à distance, en particulier des box et autres sticks fonctionnant sous Android TV qui sont illégaux au Brésil sans une certification.

Réflexions sur la régulation numérique au Brésil

Il est impératif de considérer l’importance d’un cadre législatif solide pour réguler la technologie numérique. Bien que les intentions d’Anatel de contrôler le piratage et de bloquer les appareils illégaux soient louables, il est crucial d’évaluer l’impact potentiel sur la liberté d’accès à l’information et l’innovation. Les mesures prises doivent être équilibrées afin de garantir que la protection des droits d’auteur ne se fasse pas au détriment des droits des consommateurs.

Perspectives d’avenir pour la lutte contre le piratage

La mise en œuvre d’un système de blocage automatique doit être examinée avec soin pour éviter des conséquences involontaires. Au regard des exemples passés, comme le blocage de Google Drive, il est essentiel de développer des solutions qui minimisent les erreurs afin de ne pas nuire aux utilisateurs innocents. En fin de compte, le Brésil doit se poser des questions fondamentales sur la façon dont la technologie peut être utilisée au service de la société tout en respectant les libertés individuelles.

Les titulaires de droits en exigent davantage !

Comme le souligne Torrent Freak, les détenteurs de droits réclament continuellement plus. Étant donné que les sites et services IPTV renaissent fréquemment de leurs cendres, ou que les utilisateurs réussissent à surmonter les restrictions géographiques grâce à un VPN ou un DNS alternatif, les autorités sont poussées à établir des mesures plus efficientes par les ayants droit, comme le montre le blocage automatique ou encore des actions préventives de restriction.

Cependant, la question qui se pose concerne l’utilisation et la régulation de tels mécanismes pour combattre l’IPTV illégitime. Le système en vigueur a, par exemple, récemment permis le blocage de X.com au Brésil. Cela démontre qu’une fois que des outils de restriction sont disponibles, ils peuvent être détournés à d’autres fins que celles envisagées à l’origine. Que se passera-t-il si l’autorité de régulation est en mesure de désactiver directement des appareils et des services en intervenant sur les routeurs principaux ?

Analyse des mesures de blocage

Il est crucial de s’interroger sur l’efficacité de ces mesures de blocage imposées par les ayants droit. Ces actions, bien qu’elles semblent justifiées dans le but de protéger la propriété intellectuelle, peuvent également poser des défis majeurs en matière de libre accès à l’information et à la culture. Dans un monde où les utilisateurs cherchent à accéder à des contenus divers et où la technologie évolue rapidement, des stratégies de filtrage doivent nécessairement être mises en place avec une grande précaution. Le danger est que le pouvoir de bloquer des sites ou d’interférer avec des services en ligne pourrait être utilisé de manière abusive, ne créant alors que davantage de tensions entre régulateurs et consommateurs.

Vers un équilibre nécessaire

À long terme, il est impératif de trouver un équilibre entre la protection des droits d’auteur et la liberté d’accès à l’information. Les autorités doivent développer des solutions innovantes et durables qui respectent à la fois les droits des créateurs de contenu et les besoins des consommateurs. Une collaboration avec des plateformes légales qui offrent des services attrayants et abordables pourrait également servir de voie à suivre. En fin de compte, la lutte contre l’IPTV illégitime ne devrait pas se transformer en une guerre ouverte contre la technologie et les médias, mais plutôt en une quête pour un Web plus juste et inclusif.

Source : https://www.clubic.com/actualite-543029-blocage-iptv-ils-comptent-aneantir-le-piratage-avec-cette-methode-controversee.html